Knock (1923) – Jules Romains

« Tout bien portant est un malade qui s’ignore »

Je me souviens qu’en patientant pour payer ce livre, je riais déjà à la lecture de la 4ème de couverture.

Quel bonheur, quelle délicieuse (et subversive !) que cette pièce de Jules Romains, parue quelques années après la fin de la Première guerre et qui n’a pas pris une ride. Une comédie que nous retrouvons, hélas, terriblement réactualisée dans la crise sanitaire et sa gestion par les gouvernements occidentaux – la France se transformant en 2020 en véritable Knockistan. 

Knock est un (soit disant) médecin qui s’installe dans le cabinet d’une petite banlieue parisienne (Saint Maurice, encore un grand village à l’époque) à la suite d’un confrère qui part pour Lyon. Mais, à son grand désespoir, l’endroit manque cruellement de malades et les affaires tournaient donc assez mal jusque là.

C’était sans compter sur les méthodes plus que douteuses du nouveau venu qui réussit bien vite à aliter toute la population. Tous en très bonne santé au début et bien peu préoccupés par la question, les personnages vont peu à peu se muer en véritables malades imaginaires.

C’est que Knock a l’art et la manière de diagnostiquer des maux plutôt gravissimes dès lors qu’il se penche sur les corps avec ses instruments. La comédie devient alors grinçante puisqu’on sait dès les premières pages que, derrière son envie de servir la médecine, Knock cache en fait une cupidité vorace.

Ses échanges avec le pharmacien (bien en peine financièrement face à une telle absence de gens à soigner) sont irrésistibles de drôlerie et de cynisme. Cette comédie est l’occasion pour l’auteur de fustiger avec drôlerie la foi aveugle qu’on accorde aux médecins, la vanité de certains praticiens (Knock insiste pour qu’on lui donne du « docteur » à chaque fois que l’on s’adresse à lui), la crédulité des individus et leur propension à soudain se sentir mal dès qu’un spécialiste fronce les sourcils et débite quelques termes barbares.

J’ai trouvé l’ensemble parfaitement jouissif, très bien écrit et d’une finesse sans pareille sur ce corps qu’on écoute trop et sur la facilité qu’ont certains, par leur pouvoir de persuasion et leur prétendue science, de nous faire prendre des vessies pour des lanternes.

Assurément brillant !

Qui suis-je ? Voilà une question difficile à répondre.



Je suis une femme, une mère, une Française, une fille, une amoureuse, une attachée de presse freelance et aussi (et peut-être surtout) : je suis une lectrice. Les livres ont fait bien plus que m’accompagner, me tenir compagnie, bien plus que me sauver du désespoir. Ils m’ont façonnée, ils ont sculpté ma sensibilité, mon âme, ma culture. Ils m’ont faite telle que je suis, je suis le résultat vivant de mes lectures. Ils m’ont tout appris de la vie, de l’amour, des cahots du destin, du courage qu’il faut pour exister. Je pourrais vivre sans écrire, mais je ne pourrais pas vivre sans lire, j’appellerais ça vivre à moitié.

A l’époque difficile, tendance totalitaire, qui est la nôtre, les pages sont plus que jamais indispensables. En 1920 déjà, l’écrivain André Suarès prophétisait que le livre serait « le dernier refuge de l’homme libre » : une affirmation plus que jamais d’actualité.

Et que je compte bien défendre.

Anaïs Lefaucheux
Critique & conseillère littéraire

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