Métro Ciel (1999) – Claire Fourier

Un métro nommé désir

50 nuances de Grey, tu peux aller te rhabiller : la pépite érotique littéraire, c’est celle-ci ! Anastasia, oie blanche, remballe tes moues boudeuses et tes ridicules mordillements de lèvres peu inspirés ; E.L James, viens prendre quelques leçons de vocabulaire sexuel avec Claire Fourier et on en reparlera.

A peine 100 pages mais mamma mia, que calor !

Rarement lu un texte aussi intense, aussi foudroyant et aussi beau sur le désir assumé, le plaisir et la jouissance (surtout féminins), les amours clandestines, les regards inconnus que l’on croise dans une rame et sur lesquels on s’arrêterait bien. Claire Fourier nous livre deux courts – mais denses, inoubliables – récits portés par une voix de femme en phase avec son envie d’homme(s).

L’un d’eux se prénomme Mathieu et il va harponner les yeux de Gabrielle dans un wagon anonyme, un soir de métro-boulot-dodo. Dans la vraie vie, les étrangers s’en tiennent là, respectant sagement les conventions. Ici, l’imagination débridée et la richesse lexicale (folle) de la narratrice nous entraînent dans une épopée sensuelle et haletante (c’est le cas de le dire) entre deux corps qui s’abîment l’un dans l’autre.

Juste un homme et une femme rendus à l’évidence bouleversante de leur envie de l’autre… & au diable la morale ! Soudain :

Le présent est volupté et le trouble n’a d’égal que l’aisance.

Claire Fourier nous intime de donner libre cours à nos extravagances sensuelles car :

Nous ne vivons pas le dixième de ce que nous sommes doués pour vivre. Il faut passer sa vie en quête de moments rares.

Merveille, merveille absolue, croyez-moi sur parole. J’ai quasiment tout souligné tant ce texte est parfait, à lire et à relire. Ici, hommes et femmes sont de vrais égaux, la femme décide de son désir, connaît son corps, sait dire le sexe et ne craint pas de clamer qu’elle l’aime, qu’elle s’en repaît et s’en rengorge.

Voilà ce que j’appelle un vrai et grand livre féministe ! Actes Sud, distribuez-le dans tous les métros de France et de Navarre ! M’est avis que ces quelques pages torrides, fiévreuses et flamboyantes, redonneront aux usagers l’envie d’avoir envie.

Qui suis-je ? Voilà une question difficile à répondre.



Je suis une femme, une mère, une Française, une fille, une amoureuse, une attachée de presse freelance et aussi (et peut-être surtout) : je suis une lectrice. Les livres ont fait bien plus que m’accompagner, me tenir compagnie, bien plus que me sauver du désespoir. Ils m’ont façonnée, ils ont sculpté ma sensibilité, mon âme, ma culture. Ils m’ont faite telle que je suis, je suis le résultat vivant de mes lectures. Ils m’ont tout appris de la vie, de l’amour, des cahots du destin, du courage qu’il faut pour exister. Je pourrais vivre sans écrire, mais je ne pourrais pas vivre sans lire, j’appellerais ça vivre à moitié.

A l’époque difficile, tendance totalitaire, qui est la nôtre, les pages sont plus que jamais indispensables. En 1920 déjà, l’écrivain André Suarès prophétisait que le livre serait « le dernier refuge de l’homme libre » : une affirmation plus que jamais d’actualité.

Et que je compte bien défendre.

Anaïs Lefaucheux
Critique & conseillère littéraire

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