He needs to talk about David
Je suis rarement intéressée ou touchée par les autobiographies, c’est un genre qui ne m’attire guère et que je lis donc très rarement.
Pourtant, voilà que je me penche sur l’œuvre de Lionel Duroy dont j’ai découvert tardivement que c’était son histoire que j’avais vue en film, enfant, dans le marquant Priez pour nous. Je me souvenais de cette famille bourgeoise désargentée qui finissait dans une cité après avoir habité les beaux quartiers de Neuilly. Je me rappelle cette mère névrotique et ce père bizarre, dont il est souvent question dans le livre.
J’ai choisi de lire Colères un peu par hasard, en lisant quelques critiques en diagonale. Sans doute aurais-je dû commencer par Le Chagrin, cependant ce livre peut très bien se lire indépendamment. J’ai énormément aimé ce livre qui est la confession bouleversante et courageuse d’un homme qui a choisi d’écrire son histoire pour exorciser ses démons, comprendre, à la lumière d’une enfance qu’on devine terrible, ses échecs, ses peurs, ses névroses et, surtout dans ce livre, tenter d’éclairer la relation très problématique qu’il a avec son fils David.
Une bonne partie du livre tourne autour d’une lettre initiale de celui-ci, véritable bombe dans le quotidien assez rangé du narrateur/écrivain. Il égrène ensuite au gré de ses balades à vélo, au fil de ses pensées, des souvenirs divers, fait remonter des épisodes, croise et entrecroise les gens et les situations pour essayer de comprendre ce qui lui vaut tant de tragédies et de situations désespérées.
J’ai ressenti beaucoup d’empathie envers cet homme si bon, si sensible et si intelligent qui ne fait qu’accumuler les difficultés et collectionner les abandons – cela m’a fait de la peine, je l’avoue – et m’a fait réfléchir, vraiment. Intéressée que je suis par l’écriture, je suis toujours passionnée par les témoignages d’écrivains, par ce qui guide quelqu’un vers l’écriture, à un moment donné : pourquoi écrire et surtout, sur quoi ? Ce livre est très éclairant à ce niveau et nous montre quelqu’un que l’écriture a à la fois sauvé et dévasté, occupant tout son temps libre, au détriment de sa vie de famille, selon ses propres aveux.
Ecrivant, ne cessant jamais d’écrire « pour ne pas succomber sous le poids des événements. » On y découvre ce formidable courant de conscience qui transforme le flux des pensées en œuvre littéraire, ce qui m’a paru en tous points fabuleux.
Je m’en vais de ce pas poursuivre mon exploration de la vie chaotique de Lionel Duroy, dont la sensibilité, l’émotion incandescente et la belle plume sobre m’ont totalement séduite.
Je garde en tête certains très beaux passages qui m’ont beaucoup parlé, notamment sur la filiation, et sur ce que c’est d’être parent :
Élever un enfant, c’est lui apprendre à porter avec légèreté, avec élégance, cette part sombre et nauséeuse que chaque être contient et avec laquelle il faut cheminer et composer toute sa vie.