Le réfectoire un soir et la piscine sous la pluie (1998) – Yoko Ogawa

Perplexité

C’est le titre qui m’a attirée, je crois.

Et puis il faut bien avouer que j’ai besoin de délicatesse en ce moment – la littérature japonaise était tout désignée.

Ce bref ouvrage contient deux histoires : « Le réfectoire un soir et une piscine sous la pluie » donc, et « Un thé qui ne refroidit pas ». La quatrième de couverture d’Actes sud parlait de souvenirs et d’inconscient, de mémoires et de rencontres bouleversantes. J’en attendais beaucoup.

Je lu ce recueil d’une traite sur un vol Nice – Paris et voilà ce que j’en ai retenu :

1) La première histoire raconte la rencontre, par hasard, d’une jeune femme et d’un homme accompagné de son fils de 3 ans. Leur kif ? Admirer des réfectoires et s’extasier devant les énormes lave-vaisselle et la robotisation du processus de fabrication des beignets de crevette. Le père se met à raconter sa vie à cette jeune inconnue en revenant sur un épisode marquant de sa prime jeunesse : le cours de piscine où il ne savait pas nager. C’est fou non ? (non)

Bon, on comprendra ensuite, grâce à une nouvelle confession, ce qui suscite sa fascination pour les réfectoires. Qui sont en fait une réminiscence désagréable de son enfance (encore) mais du coup, je n’ai pas compris pourquoi il restait bloqué dans l’admiration d’une chose qui l’a traumatisé. Les descriptions sont douces, subtiles, évocatrices mais cela ne suffit pas à en faire une histoire intéressante.

2) La deuxième histoire est un poil plus dense mais m’a quand même laissée sur ma faim. Rien de pire que ce sentiment de perplexité quand on referme un bouquin et qui vous fait vous demander ce que vous avez lu, en fait.

Là c’est exactement ça. Une jeune femme assiste à la veillée mortuaire d’un ancien camarade de classe. Le pire, c’est qu’elle n’était même pas liée à lui mais bon c’est pas grave : l’événement est un prétexte pour aborder la finitude. Soit. Elle retrouve sur place un ancien élève qu’elle avait perdu de vue, ils se mettent à discuter et à la fin, il réussit à lui extorquer son 06. Classique. On s’attend donc à une histoire de rendez-vous galant. Eh bien pas du tout, figurez-vous.

En fait la fille est déjà en couple (mais en couple avec un naze) et lui est marié avec l’ex-bibliothécaire de leur collège. Sa femme est un splendeur d’une classe folle qui est du genre à mettre des petites housses sur sa théière et à avoir toujours des ongles immaculés. On sent que la fille est un peu déçue qu’il soit pris, elle n’aurait sans doute pas boudé le plaisir d’une nouvelle rencontre mais l’histoire ne s’attarde pas trop sur ce point.

Non, le récit se contente d’accumuler les petits détails censément symboliques mais qui sont demeurés pour moi d’une opacité impénétrable. Tout paraît métaphorique, tout est poétique, petites touches impressionnistes, et pourtant on sent une sourde violence transpirer entre les lignes sans qu’on comprenne vraiment ce que l’auteur a voulu dire.

Déception globale.

Qui suis-je ? Voilà une question difficile à répondre.



Je suis une femme, une mère, une Française, une fille, une amoureuse, une attachée de presse freelance et aussi (et peut-être surtout) : je suis une lectrice. Les livres ont fait bien plus que m’accompagner, me tenir compagnie, bien plus que me sauver du désespoir. Ils m’ont façonnée, ils ont sculpté ma sensibilité, mon âme, ma culture. Ils m’ont faite telle que je suis, je suis le résultat vivant de mes lectures. Ils m’ont tout appris de la vie, de l’amour, des cahots du destin, du courage qu’il faut pour exister. Je pourrais vivre sans écrire, mais je ne pourrais pas vivre sans lire, j’appellerais ça vivre à moitié.

A l’époque difficile, tendance totalitaire, qui est la nôtre, les pages sont plus que jamais indispensables. En 1920 déjà, l’écrivain André Suarès prophétisait que le livre serait « le dernier refuge de l’homme libre » : une affirmation plus que jamais d’actualité.

Et que je compte bien défendre.

Anaïs Lefaucheux
Critique & conseillère littéraire

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