La théorie du panda (2008) – Pascal Garnier

Pas vraiment l’ange Gabriel

C’est avant tout une ambiance, une voix, la chimie d’un style immédiatement « atmosphérique » qui nous embarque dès les premières lignes du bref roman de Pascal Garnier, « La théorie du panda ».

Nous y découvrons sur un quai de gare en Bretagne un personnage esseulé, Gabriel, qui va s’installer dans un hôtel et faire plusieurs rencontres. Au gré d’un forme d’errance dont nous ne saisirons pleinement les contours qu’au fil de l’histoire, Gabriel va se lier avec différents personnages comme autant de « rencontres et hasards » : un restaurateur portugais, une standardiste, un couple un peu paumé… Tous sont plus ou moins « borderline », leurs histoires sont glauques ou tristes, mais leurs soirées attachantes et chaleureuses. Gabriel fait, d’entrée, preuve d’une générosité culinaire impressionnante en proposant ses talents de cuisinier (j’ai d’ailleurs particulièrement aimé les passages, très appétissants, qui tournent autour des repas).

Chacun est rendu à son drame, à sa petite tragédie individuelle un peu sordide et Gabriel, au milieu de tous, fait figure de mystère. Taiseux, inébranlable sensuellement, asexué (malgré plusieurs tentatives féminines), silencieux sur son passé, le personnage est toutefois régulièrement traversé de réminiscences brutales qui font signe vers un massacre familial traumatique.

Néanmoins, nul ne peut prévoir, compte tenu de l’ambiance amicale et bonhomme des rassemblements des personnages, l’ahurissante tournure que vont prendre les événements dans les dernières pages. J’avoue avoir dû relire plusieurs fois certains paragraphes pour être sûre de ne pas m’être trompée d’interprétation. Je ne cache pas une certaine déception quant au virage macabre que prend le roman et qui, pour moi, arrive un peu comme un cheveu sur la soupe après tant de doux éclats d’humanité partagée.

Pourtant, j’ai aimé ce roman à la plume brute et vraie, tissée de sagesse proverbiale et d’une forme d’humanisme assez poignant dans son genre. Les personnages sont sans filtre, se réchauffent et s’offrent une oreille attentive, le gîte ou le couvert, avec un naturel désarmant. J’ai noté aussi le petit clin d’œil de l’auteur à un autre écrivain de la maison Zulma, à savoir le grand Marcus Malte.

Bref, heureuse d’être entrée dans le roman noir de Pascal Garnier qui, même s’il m’a un peu déconcertée, ne m’en a pas moins donné envie d’explorer le reste de son œuvre !

Un grand merci aux sublimes éditions Zulma pour cette découverte !

 

Qui suis-je ? Voilà une question difficile à répondre.



Je suis une femme, une mère, une Française, une fille, une amoureuse, une attachée de presse freelance et aussi (et peut-être surtout) : je suis une lectrice. Les livres ont fait bien plus que m’accompagner, me tenir compagnie, bien plus que me sauver du désespoir. Ils m’ont façonnée, ils ont sculpté ma sensibilité, mon âme, ma culture. Ils m’ont faite telle que je suis, je suis le résultat vivant de mes lectures. Ils m’ont tout appris de la vie, de l’amour, des cahots du destin, du courage qu’il faut pour exister. Je pourrais vivre sans écrire, mais je ne pourrais pas vivre sans lire, j’appellerais ça vivre à moitié.

A l’époque difficile, tendance totalitaire, qui est la nôtre, les pages sont plus que jamais indispensables. En 1920 déjà, l’écrivain André Suarès prophétisait que le livre serait « le dernier refuge de l’homme libre » : une affirmation plus que jamais d’actualité.

Et que je compte bien défendre.

Anaïs Lefaucheux
Critique & conseillère littéraire

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