Luz ou le temps sauvage (2000) – Elsa Osorio

Fiat Luz

Rendons grâce à SensCritique : sans doute n’aurais-je jamais croisé la route de ce chef d’œuvre sans ce site, alors déjà un grand merci.

Déjà deux livres que je lis qui tournent autour de la dictature argentine, cette période sombre qui a vu naître les pires atrocités (tortures barbares, séquestrations, enlèvements, assassinats) : un terreau romanesque fertile déjà bien exploité dans Mapuche de Caryl Férey et qui revient aujourd’hui dans ma vie via ce superbe Luz ou le temps sauvage.

Luz est une jeune Argentine qui vient d’être maman et commence sérieusement à douter de ses origines. Son prénom n’a évidemment pas été choisi par hasard par l’auteur, puisque c’est elle qui va faire toute la lumière sur la sombre histoire de ses origines, de sa famille, et lever le voile sur les mystères de sa naissance.

Ce récit haletant, lumineux et tragique, mené tambour battant sur plus de 300 pages, se dévore comme un thriller. L’auteur, Elsa Osorio, est également scénariste, et cette compétence donne à ce livre une dimension cinématographique très certaine. Elle possède un sens aigu de l’action, du suspense et de la mise en scène. La narration est très dynamique, intercale habilement passé et présent, ce qui apporte énormément à l’histoire en permettant de prendre du recul par rapport aux événements passés.

L’histoire démarre par une discussion entre Luz et un homme auquel elle va confier, longuement, le fruit de ses recherches obstinées pour faire émerger la vérité sur sa vie. Bouleversante réflexion sur l’identité, le courage et la ténacité, ce livre m’a énormément remuée : il dit en effet comme tout secret finit inexorablement par être percé, comme l’enfant connaît, intuitivement – presque organiquement – les méandres de sa vie.

Luz ou le temps sauvage, ce sont également de superbes portraits de femmes qui, portées par l’amour et la détermination, feront tout pour qu’éclate la vérité, pour que le bien triomphe de l’obscurité et de tous les fantômes qui rôdent. Merveilleuse peinture aussi de la maternité, et du profond changement qu’elle occasionne en toute femme : la prise de conscience d’une relation unique que rien ne saurait effacer ou même altérer, pas même les « temps sauvages » qui séparent et tuent.

Quelle plus belle et plus simple déclaration d’amour filial que cette phrase qui finira de réconcilier Luz avec sa vie :

On voulait que tu naisses parce qu’on s’aimait.

Je referme ce livre les larmes aux yeux, profondément émue par cette quête qui finit bien et par cette victoire de la lumière sur les ténèbres : une pépite à mettre entre toutes les mains.

Qui suis-je ? Voilà une question difficile à répondre.



Je suis une femme, une mère, une Française, une fille, une amoureuse, une attachée de presse freelance et aussi (et peut-être surtout) : je suis une lectrice. Les livres ont fait bien plus que m’accompagner, me tenir compagnie, bien plus que me sauver du désespoir. Ils m’ont façonnée, ils ont sculpté ma sensibilité, mon âme, ma culture. Ils m’ont faite telle que je suis, je suis le résultat vivant de mes lectures. Ils m’ont tout appris de la vie, de l’amour, des cahots du destin, du courage qu’il faut pour exister. Je pourrais vivre sans écrire, mais je ne pourrais pas vivre sans lire, j’appellerais ça vivre à moitié.

A l’époque difficile, tendance totalitaire, qui est la nôtre, les pages sont plus que jamais indispensables. En 1920 déjà, l’écrivain André Suarès prophétisait que le livre serait « le dernier refuge de l’homme libre » : une affirmation plus que jamais d’actualité.

Et que je compte bien défendre.

Anaïs Lefaucheux
Critique & conseillère littéraire

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